Avons nous toujours le choix ?
Charles Pépin, philosophe : extrait de sa chronique sur France inter le 16 mars 2024
Non, nous n’avons pas toujours le choix….
nos choix sont conditionnés par notre éducation, milieu social, petite enfance, place dans la fratrie, notre génome, notre corps, nos affects, notre inconscient etc…
3 philosophes du soupçon (Marx, Freud, Nietzsche) ils soupçonnent qu’il y ait sous notre prétendue liberté, sous nos prétendus choix libres, bref, sous l’illusion de l’arbitre, qu’il y ait autre chose qui fait que nous ne choisissons pas vraiment :
pour Freud, nous sommes déterminés par notre inconscient, nos pulsions inconscientes refoulées
pour Marx, nous sommes déterminés par notre classe sociale
pour Nietzsche , nous sommes déterminés par notre génome, nos instincts profonds
« Oui nous avons toujours le choix » citation de Jean-Paul Sartre, pour Sartre nous sommes la somme de nos choix, rien d’autre que nos choix et que ne pas choisir c’est encore choisir.
Pour Charles Pépin on n’est pas totalement libre, on est partiellement libre.
C’est en comprenant que nous sommes peu libres et que nous sommes fortement conditionnés, que nous sommes fortement influencés, que nous allons délimiter l’espace de liberté qui reste, le tout petit espace qui nous reste, et qui va grandir …comment le faire grandir ? : déjà en prenant conscience que nous avons plusieurs maîtres (Freud, Nietzsche, Marx) qui veulent nous asservir en même temps, et qui se font la guerre entre eux et ce qui finalement nous rend libre …
si c’est 3 philosophes avaient raison, si nous étions totalement déterminés dans nos choix, nous n’aurions aucune liberté, et nous serions comme des choses soumises à une loi scientifique, une loi inéluctable.
Mais en se rencontrant toutes ces forces qui nous travaillent recréent du hasard, de la contingence et donc de la liberté possible et surtout au lieu d’être dans le déni de toutes ces forces qui nous travaillent et de répéter précisément « on a toujours le choix » comme un mantra ou un vœu pieu, commençons par essayons de connaître les forces en présence, de monter en lucidité avant de vouloir monter en liberté, plus nous connaîtrons combien nous sommes peu libres et plus nous pourrons reconquérir notre liberté…..
…….Plus nous nous connaissons, plus nous avons conscience de nos goûts, nos valeurs, nos croyances plus on se libère doucement, comme si la connaissance de ce qui limite notre liberté pouvait devenir la condition de possibilités de cette même liberté….
…………..la limite n’est pas dans le ciel mais dans le social, dans l’inconscient, dans le génétique, dans l’inconscient ..
notre liberté est conditionnée et elle se conquiert peu à peu, laborieusement, dans le tâtonnement, et dans la difficile connaissance de soi, de ce soi traversé par tant d’autres choses que soi.
Mais à l’horizon de cette sagesse, il y a quand même la possibilité de poser des choix, des actions qui nous ressemblent. Nous ne choisissons pas tout, mais si nous l’acceptons et nous essayons de comprendre pourquoi, nous pouvons choisir de mener une vie qui nous rassemble et nous ressemble, rassemble tout ce dont nous sommes faits, et que nous n’avons d’abord pas choisi, en quelque chose qui soit vraiment nous. Peut-être est ce le but d’une vie, ou en tout cas d’une vie accomplie ? Etre, avec le temps, de plus en plus en capables de faire, en conscience, des choix qui nous ressemblent.
Un petit livre plein de sagesse du philosophe Charles Pépin « la confiance en soi »
« Décider, c’est faire acte de présence au coeur de l’incertain, au coeur de la vie même. Chaque fois que nous prenons une décision en conscience, nous apprenons un peu plus à nous faire confiance »
« Décider, c’est trouver la force de s’engager dans l’incertitude, réussir à y aller dans le doute, malgré le doute »
« …..Elle prend sa décision en connaissance de cause. Elle se sent forte, non pas parce qu’elle est sûre d’avoir pris sa décision, mais simplement parce qu’elle a décidé….. »